On part pour un malaise “banal”. On se retrouve coincé des heures à guetter son nom dans une salle bondée. Ce n’est pas un film catastrophe: c’est le quotidien des urgences dans de nombreuses villes
Les temps d’attente s’allongent, les équipes signalent des services en difficulté, des fermetures nocturnes ponctuelles et des dérivations vers d’autres hôpitaux, parfois à plusieurs dizaines de kilomètres.

Selon la DREES, on compte plus de 20 millions de passages aux urgences chaque année. Dans plusieurs départements, l’attente avant la première prise en charge médicale a nettement augmenté ces derniers mois.
Le cœur du problème : le manque d’infirmiers et d’aides-soignants. Les soignants restants sont épuisés, enchaînent les heures supplémentaires et peinent à maintenir un accueil digne, surtout la nuit et le week-end.
Autre verrou : les lits d’aval manquent dans les services d’hospitalisation. Résultat, les patients “stagnent” aux urgences et tout le parcours de soins se grippe : c’est l’embouteillage hospitalier.
L’afflux monte aussi : population vieillissante, épidémies saisonnières, accès inégal aux médecins de ville. Le Service d’accès aux soins (SAS) doit mieux réguler l’orientation 24/7, mais sa couverture reste hétérogène. Dans les couloirs, les brancards s’alignent et les lits se remplissent plus vite qu’ils ne se libèrent : la file d’attente s’installe, et avec elle l’anxiété.
Ce que demandent les professionnels de santé
D’abord, des recrutements stables et des effectifs sécurisés par poste. Puis des conditions de travail tenables : repos post-garde garantis, horaires prévisibles, rémunération revalorisée des nuits et des week-ends.

Ensuite, remettre des lits dans les services d’aval, développer l’ambulatoire et permettre aux IPA et assistants médicaux de soulager les tâches. Objectif : fluidité du triage à la sortie, sans ruptures.
Enfin, un cap clair. Les collectifs de soignants réclament des engagements datés, et pas seulement des primes. Plusieurs journées de mobilisation ont rassemblé des équipes d’urgences ces derniers mois. Des organisations comme Samu-Urgences de France alertent depuis des années : à l’échelle d’un service, chaque heure perdue pèse sur la douleur, l’angoisse et, parfois, sur le pronostic.
Attendre n’est pas qu’une gêne : c’est un risque quand la douleur s’aggrave, quand on renonce à rester, quand on se décourage avant la prise en charge. Dans la salle d’attente, on croise des mères avec un enfant fiévreux, des étudiants avec des points de suture, des retraités essoufflés. Tous attendent la même chose : un signe qu’on les voit encore.
La France sait faire de la médecine d’excellence. Saura-t-elle, collectivement, remettre de la fluidité là où le système cale, pour que l’attente aux urgences ne soit plus jamais un risque calculé ?
 
 




